• Quoi ? Cinq francs le litre d'essence !

    Oui, vous avez bien lu. Non, ce chiffre brandi par les opposants à l'initiative proposant d'introduire une taxe sur les énergies non renouvelables en lieu et place de la TVA n'est certainement pas exagéré. C'est ce qui attend vraisemblablement les automobilistes de ce pays si l'initiative est acceptée.

    Et pourtant, j'accorderai mon oui à cette initiative. Mais pourquoi donc ?

    Avant tout, regardons plus exactement de quoi il est question :

    Aujourd'hui, en Suisse comme partout ailleurs en Europe, est en vigueur le système de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Cela signifie que si quelqu'un, qu'il s'agisse d'une entreprise ou de vous et moi, achète des courges à un marchand ou paye le plombier venu déboucher la baignoire, paye en plus une taxe à la Confédération (souvent sans même y songer car incluse dans la facture) : 8% en général, 2.5% pour certains biens «de base» (alimentation, livres, etc.). Cet argent, tout comme les impôts, sert à financer les diverses tâches de la Confédération (services publics, assurances sociales mais encore autoroutes ou armée) et constitue 35% des revenus fédéraux.

    L'initiative propose de supprimer cette taxe.

    En contrepartie, dans une perspective écologique, une taxe nouvelle serait introduite, taxe qui toucherait exclusivement les énergies non renouvelables (c'est à dire nucléaire, gaz, charbon, pétrole et dérivés) ainsi que l'énergie grise qui se cache derrière de nombreux produits. Cependant ces taxes devraient rapporter à la Confédération autant d'argent qu'en rapporte la TVA aujourd'hui. Naturellement, pour atteindre cet objectif, les taxes devront être très fortes. Cela implique que les prix de l'essence, du mazout, du gaz et, dans une moindre mesure, de l'électricité seront bien plus élevés qu'aujourd'hui.

    Certains prétendent que ce n'est pas aux pauvres citoyens que nous sommes de supporter les couts d'une transition vers d'autres énergies plus propres. Eh bien moi je prétends que si. Si, parce que le réchauffement climatique est bel et bien là et nous concerne tous, qu'on le veuille ou non. Et c'est bien nous, en circulant en voiture, en nous chauffant au gaz et en achetant des produits dont la fabrication et le transport sont polluants, qui contribuons au réchauffement planétaire. De plus, avec la suppression de la TVA, les prix de beaucoup de biens et services baisseront, donc au final nous ne payerons pas plus de taxes.

    D'autres diront que cette taxe, en remplissant son objectif de diminution de la consommation d'énergie non renouvelable, va en quelque sorte s'autodétruire, menant la Confédération et tout ce qui en dépend (AVS, AI, CFF, …) à des soucis financiers. Bien entendu qu'une telle taxe ne va pas assurer les recettes fédérales sur le long terme ! Seulement, il n'est pas interdit, une fois la taxe sur l'énergie ayant rempli son rôle, de la remplacer à nouveau par une TVA ou d'augmenter les impôts pour les plus fortunés (ce qui serait plus juste qu'une TVA qui s'applique à tous sans distinction).

    Par contre, tant que cette taxe sera en vigueur, elle devra pour générer suffisamment de revenus être augmentée au fur et à mesure que la consommation d'énergie polluante baissera, incitant de plus en plus les gens à se tourner vers d'autres sources d'énergie, et, mieux encore, à réduire leur consommation.

    De plus, l'essence devenant plus onéreuse, beaucoup de personnes n'habitant pas en zone urbaine risquent de se tourner plus fréquemment vers le train, ce qui générera d'autant plus de rentrées financières aux compagnies ferroviaires et leur permettra d'améliorer leur offre (meilleure desserte en zone rurale, nouvelles lignes, etc.).

    De même, la demande pour de nouveaux véhicules non polluants s'en trouvera grandie et les sociétés développant de tels véhicules ne seront plus soumis à la concurrence «déloyale» des automobiles roulant aux hydrocarbures.

    Pour couronner le tout, ne plus dépendre des sources d'énergie fossile assurerait un approvisionnement énergétique sans avoir à se plier aux conditions des mafieux qui détiennent les réserves de pétrole, de gaz et d'uranium.

    Définitivement, cette idée serait profitable à l'environnement mais aussi au plus grand nombre. Si cela fonctionne en Suisse, alors certainement que l'Europe et même d'autres s'en inspireront.

    Ce n'est pas souvent que nous sommes amenés à voter sur des initiatives réellement utiles à la société. Pour une fois que l'occasion s'en présente, il ne faut pas hésiter. Même s'il y a peu de chances que ce pays conservateur accepte une telle mesure, votons clairement OUI !

     

    Cela dit, vous trouverez dans la même enveloppe de votation une autre initiative nettement moins utile. Son objectif ? Réduire les impôts prioritairement pour les familles aisées, secondairement pour les familles moins aisées et pas du tout pour tous ceux n'ayant pas d'enfants. Cela n'est pas présenté ainsi mais c'est bien là de quoi il retourne. Même si une réduction d'impôts sonne bien au premier abord, ce seront autant de coupes dans les services publics, et surtout… un peu de justice, que diable ! Il n'y a pas lieu de favoriser les ménages ayant des enfants face aux autres, et encore moins d'offrir des cadeaux aux riches.


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