• En cette période de campagne électorale en Suisse, il est une question que nombre d'entre vous allez vous poser : vais-je aller voter ou non ? Question judicieuse s'il en est, surtout si vos opinions politiques sont assez proches de celles de l'auteur...

    Comme vous le savez certainement, on oppose généralement démocratie directe et démocratie représentative ou parlementaire. La frontière entre les deux peut parfois paraitre un peu floue, cela essentiellement du fait que beaucoup de systèmes politique représentatifs se réclament à tort de la démocratie directe, ou parfois d'une démocratie « semi-directe ». Une véritable démocratie directe est un système dans lequel les citoyens exercent pleinement leur souveraineté, sans déléguer celle-ci à des représentants élus.

    Parmi les partisans d'un tel système, dont je suis, une majorité prône l'abstention systématique lors d'élections parlementaires ou gouvernementales. Cela est aisément compréhensible : il est à première vue évident de refuser d'élire des gens dont on refuse l'autorité. Toutefois, tout en partageant l'idéal de démocratie directe, je considère pour ma part qu'il est sensé et même très souhaitable de participer aux élections, afin de pouvoir réaliser cet idéal.

    Nous faisons ici face à une grande question que peuvent et qu'ont pu se poser tous ceux qui se trouvent en désaccord avec la société dans laquelle ils vivent : rester ou sortir ? Autrement dit, vaut-il mieux quitter une société mauvaise pour en reconstruire une meilleure en dehors de celle-ci ou faut-il tenter de modifier cette société de l'intérieur ? On oppose généralement ces deux approches, et pourtant je ne vois pas en quoi elles sont incompatibles. On peut très bien construire des alternatives en dehors de ce qui existe déjà, sans pour autant abandonner l'existant à une libre dérive qui risque bien de le mener à sa perte.

    En effet, si les personnes aspirant à une société démocratique et égalitaire refusent de participer au système politique d'une société qui ne l'est pas vraiment, elles vont précisément contribuer au renforcement des tendances qui leur sont opposées. Les mouvances nationalistes, capitalistes et xénophobes se satisfont pleinement du système politique actuel qui leur est favorable. Si aucune réelle opposition ne leur est faite sur leur propre terrain, le pouvoir de celles-ci ne va cesser de grandir et les effets négatifs ne tarderont pas à se faire sentir sur l'ensemble de la société (privatisations, fermeture des frontières, répression policière, ...). Au contraire, certains courants politiques, sans pour autant viser l'abolition de l'autorité ou du système marchand, se montrent beaucoup plus ouverts face aux cultures dites « alternatives », font preuve de beaucoup plus de respect des différences, sont généralement partisans de la non-violence et se montrent soucieux du respect de l'environnement.

    Aussi, les institutions étatiques étant bel et bien là, et même si je préfèrerais une organisation sociale radicalement différente, j'estime nettement préférable qu'elles soient dirigées par des gens du type cité précédemment, plutôt que par les partisans du capitalisme effréné et de la répression à tout va. Vous me direz, mais pourquoi ne pas directement renverser le système et mettre en place une organisation meilleure ? Le problème est simple : un tel ordre social ne peut fonctionner sans qu'un nombre conséquent de personnes y adhèrent. Or ce n'est malheureusement pas le cas aujourd'hui. Beaucoup se satisfont des avantages que le système consumériste leur apporte et ne voient pas la nécessité d'un changement. Même parmi les plus défavorisés, nombreux sont ceux qui, devant notamment l'échec du « communisme » soviétique (qui, cela dit, n'était pas un échec dans tous les domaines), se résignent à croire qu'il n'y a pas de meilleure alternative au système actuel.

    Alors, si vous hésitez encore, je vous dis : oui, allez voter ! Faute d'avoir changé le monde comme certains pourraient tenter de vous le faire croire, vous aurez au moins contribué à freiner la spirale infernale dans laquelle semble toujours entrer ce système à chaque nouvelle crise. Si ce n'est pour vous, faites-le au moins pour ceux qui n'ont pas envie d'avoir à lutter toujours plus contre une société toujours plus inhumaine...


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  • Face à l'afflux de réfugiés fuyant la guerre et la dictature au Proche-Orient, l'Europe se barricade. Et lorsque je parle de barricades, n'y cherchez pas une quelconque métaphore : il s'agit bien de solides barrières qui commencent à s'élever aux frontières extérieures de l'UE.

    Vingt six ans plus tôt, en mai 1989, la Hongrie était le premier pays à démanteler le rideau de fer qui séparait alors Est et Ouest. Ironie de l'histoire, aujourd'hui la même Hongrie est la première à reconstruire des barrières en plein milieu de l'Europe. C'est une clôture haute de quatre mètres qui est en cours de construction sur les 175 km de frontière avec la Serbie…

    L'Union a presque aboli ses frontières intérieures, mais cette évolution s'est accompagnée et s'accompagne de plus en plus du renforcement des frontières extérieures. La Grèce et la Bulgarie ont déjà construit des « murs » similaires à leur frontières avec la Turquie, l'Espagne a fait de même autour de ses exclaves sur la côte marocaine.

    Aux frontières de l'UE où la pression migratoire n'est pas trop forte, par exemple les frontières orientales avec la Russie, il n'est pour l'instant pas question de clôtures mais les contrôles se sont largement renforcés depuis l'entrée des pays concernés dans l'Espace Schengen. En résulte naturellement une situation assez gênante pour les populations vivant dans les zones frontalières.

    Pour revenir à la situation en Hongrie, voici comment le président Viktor Orbán justifie ce blocus :

    « Il existe un lien clair entre les immigrants illégaux qui viennent en Europe et l’augmentation du terrorisme. C’est évident pour les pays anglo-saxons, mais les autres le nient. Et nous ne pouvons bien-sûr pas exfiltrer les terroristes de cette gigantesque foule. »

    La montée du terrorisme en Europe ne doit pas plus aux immigrés illégaux qu'aux immigrés légaux et encore moins qu'à l'endoctrinement de la population résidente par des fanatiques (essentiellement islamistes), via internet notamment. Les fanatiques en question, s'ils souhaitent venir en Europe, choisiront à coup sûr une voie bien plus rapide et confortable, car ces gaillards-là ne sont pas de pauvres gens sans le sou…

    Alors, oui, il faut lutter contre le terrorisme, mais cette lutte doit se faire non pas en devenant paranoïaque comme semblent le devenir de plus en plus de gens dans le monde occidental, mais en combattant le mal à sa source. Comme il nous sera difficile de démanteler les réseaux terroristes internationaux, il faut éviter à tout prix que des gens rejoignent ces milieux, ce qui passe par de la prévention mais surtout par plus de solidarité envers les classes défavorisées. La misère est la voie royale vers la violence, surtout dans une société inégalitaire. Il est plus que jamais nécessaire de ne laisser personne au bord du chemin.

    Pas de sécurité sans solidarité, cela me semble évident, mais visiblement ce n'est pas l'avis de tout le monde sur ce continent. Peut-être ceux-là sont-ils nostalgiques du grand rideau de fer…


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